C'est avec une profonde tristesse que nous avons appris la disparition de Francine Van Hove, survenue ce mardi 5 août.
Née en 1942, elle s'oriente d'abord vers une carrière de professeur en intégrant la classe préparatoire au professorat de dessin et d'arts plastiques au lycée Claude Bernard à Paris. Après l'obtention de son CAPES en 1963, elle enseigne au lycée de jeunes filles de Strasbourg mais démissionne de l'Éducation nationale un an et demi plus tard.
De retour à Paris, après des petits boulots, elle travaille pour la haute couture à la création de motifs à l'encre pour tissus imprimés. Cette technique l'incite à affiner sa recherche picturale en superposant des couches transparentes de façon à obtenir un rendu comparable aux glacis à l'huile des maîtres flamands qui magnifie les effets de lumière et de matière. En 1971, le recours à son premier modèle vivant est le facteur ultime et décisif de son processus de travail, toujours basé sur l'exécution de plusieurs dessins préparatoires à la pierre noire ou au pastel. C'est à ce moment qu'elle commence à développer une œuvre figurative exclusivement féminine et intimiste.
Ses modèles, souvent trouvées au hasard des rencontres, tiennent un rôle primordial dans l'élaboration des attitudes et des compositions. Doublures de l'artiste, elles sont aussi des réminiscences des personnages de son panthéon personnel : la statuaire égyptienne et grecque antique, la Renaissance italienne, la peinture flamande du 17e siècle, Georges de La Tour, Edgar Degas… Ces jeunes femmes mettent en scène les gestes du quotidien - se réveiller, lire, se coiffer, rêvasser, s'assoupir - qu'elles embellissent dans le monde clos de l'atelier de l'artiste, son salon ou jardin, en utilisant un répertoire d'accessoires familiers récurrents.
Dans ses scènes de genre, entre mystère et simplicité, perfection formelle et registre anecdotique, Francine Van Hove cherche à saisir la quintessence de la beauté : "Plus j'essaie de cerner ou de capter la beauté, plus son mystère m'échappe. Mais cela ne m'étonne ni ne me désespère plus, car je me suis prise peu à peu de passion pour cette poursuite même".
Au début des années 1980, elle rencontre les marchands Alain et Michèle Blondel avec qui elle débute une longue collaboration. La galerie Alain Blondel lui consacre de nombreuses expositions, accompagnées de catalogues, et montre régulièrement son travail dans les grandes foires internationales, notamment à la FIAC pendant plus d'une dizaine d'années, en Europe et aux États-Unis.
C'est à cette époque que son œuvre commence à susciter un engouement croissant auprès d'un public divers, sans distinction d'âge, de genre ni de classe sociale. Ce phénomène assez inédit pour un peintre ne s'est jamais démenti depuis, amplifié par les réseaux sociaux : nombre de femmes y postent ses peintures de jeunes femmes dans des attitudes apaisantes, en train de "chiller", quand elles ne copient pas ses poses. Alain Blondel en avait bien perçu les raisons : "Les femmes reconnaissent une part essentielle de leur vérité dans ces dessins et ces peintures. Elles y découvrent des sentiments qui n'avaient jamais été aussi clairement exprimés. Quant aux filles, elles peuvent, pour un instant, laisser tomber leurs armures, dentelles, ficelles. Combattantes et amoureuses au dehors, elles se retrouvent enfin seules devant des miroirs magiques de papier et de toiles. Et elles s'en trouvent bien".
Francine Van Hove laissera le souvenir d'une personne d'une grande douceur qui a recréé dans le secret de son atelier tout un monde hors du temps à son image, discret et gracieux, cultivé sans être prétentieux. Son nom restera associé à cette manière d'être si féminine du corps et des gestes, que l'artiste aura su révéler par son regard sororal. Et son œuvre restera aussi parce qu'elle continuera de nous faire du bien.
Nos pensées affectueuses vont à sa famille et à ses modèles.